Avec l’élection récente de nombreux dirigeants (Trump au premier chef, mais aussi Milei en Argentine ; avant cela Orban en Hongrie ou Meloni en Italie) que la presse mainstream qualifie pudiquement « d’illibéraux » mais que nous nommerons par leurs noms, des fascistes (qu’ils soient apprentis ou confirmés), le monde est entré dans une période de chaos.
Partout où ils arrivent au pouvoir, les premières victimes sont toujours les mêmes : la connaissance et les idées de progrès.
En tant qu’enseignant·es, nous sommes en première ligne de ces attaques. Il n’est qu’à voir l’exemple donné par Trump aux Etats-Unis. Dès son arrivée au pouvoir, lui et le milliardaire Musk, figure de proue du capitalisme de surveillance issue de la Silicon Valley1, s’en sont pris aux moyens accordés au ministère fédéral de l’Education. Celui-ci a en effet annoncé, mardi 11 mars, le licenciement de près de la moitié de son personnel, une mise en application de la volonté de Donald Trump de démanteler l’organisme – qu’il accuse de promouvoir des idées progressistes. Prenant appui sur le résultat des évaluations nationales, Trump est allé encore plus loin en signant le 20 mars dernier un décret qui prépare la suppression pure et simple de ce ministère au nom de « l’efficacité » (lequel doit encore recevoir l’aval d’une majorité qualifiée au Congrès).
En Argentine, l’apprenti-dictateur Javier Milei élu fin 2023 a tout de suite acté des coupes budgétaires massives dans l’enseignement supérieur et une perte de salaire de près de 50 % pour les personnels de l’Education nationale, sans compter les coupes dans le budget des cantines scolaires. Et comme si cela ne suffisait pas, il envisage également de s’attaquer au droit de grève au motif que l’éducation ne serait pas un droit social universel.
Voilà quelques exemples qui sont autant de mises en garde. Ici même, un gouvernement minoritaire et battu lors des dernières élections législatives, celui de François Bayrou, a procédé à des coupes sévères dans le budget du ministère de l’Education nationale (moins 1,2 milliards d’euros) et dans celui de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (moins 1,3 milliards d’euros) avec le soutien tacite du Rassemblement national, lequel a refusé de voter la censure lors du vote du budget. L’admiration de Marine Le Pen et de Jordan Bardella pour leurs compères d’Outre-Atlantique et leurs « vérités alternatives », ne laisse guère de doute sur leurs projets pour l’Ecole publique.
Dans cette période où l’ancien monde se meurt et où le nouveau peine à naître comme le disait Gramsci, des monstres sont à l’œuvre pour abattre l’héritage émancipateur des Lumières et de la Révolution française. Si nous avons réussi à trouver l’énergie pour les repousser en France lors des dernières élections législatives, l’attitude irresponsable et anti-démocratique de l’actuel locataire de l’Elysée prépare les futurs succès électoraux de l’extrême-droite en France.
Plus que jamais, nous devons regarder l’ennemi en face et nous préparer à le combattre pour que vive notre idéal de progrès humain.
1Cf. notamment les travaux de Shoshana Zuboff, L’Âge du capitalisme de surveillance, Paris, Zulma, 2018